9 août 2019

170-38 - Maternité au pôle Nord, pour Fuschia

Pour fêter les 170 ans du premier timbre-poste français, j'ai choisi pour Fuschia l'ours polaire, animal emblématique qui subit en premier lieu tous les méfaits dus au dérèglement climatique et par ailleurs très représenté par les artistes céramistes.
Céramique raku créée par Nadia Treni à voir sur son site "Les sculptures de Nadia"

Je t'en souhaite bonne réception, Fuschia, ainsi qu'un bel été!

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LA BANQUISE, INDISPENSABLE A LA SURVIE DE L'OURS POLAIRE, EST EN TRAIN DE DISPARAITRE

Une nouvelle étude apporte un nouvel éclairage sur un maillon important de la chaîne alimentaire du prédateur 
-de Lesley Evans Ogden-

Chaque hiver, la banquise de l'Arctique s'étend autour du pôle Nord, ses épis s'étirant autour des côtes du grand Nord. À l'heure actuelle, la mer de glace vient tout juste d'atteindre sa couverture maximale pour l'année, elle s'apprête à rétrécir avec l'arrivée du printemps. C'est une période cruciale pour les ours polaires, dont les ressources alimentaires sont intrinsèquement liées à la banquise.
Au cours des dernières décennies, la mer de glace s'est retirée à un rythme toujours plus rapide. Selon le National Snow and Ice Data Center, la couverture de glace Arctique de 2019 est la septième plus faible depuis le début de leur collecte de données il y a 40 ans.
Cette année « ne constitue pas spécialement un record, c'est plutôt la tendance qui compte, » explique le scientifique Andrew Derocher de l'université d'Alberta, spécialiste des ours polaires. « Ce qui est inquiétant, c'est la tendance descendante de la couverture de glace en Arctique sur l'ensemble de la période, » précise-t-il. « À présent, nous attendons de voir les conséquences des conditions printanières. » Un printemps froid permet à la glace de persister, les ours polaires peuvent donc accéder plus facilement à l'un de leurs aliments préférés : les phoques. À l'inverse, un printemps chaud réduit l'étendue de leur autoroute alimentaire favorite. « Pour les ours polaires, c'est la loi du plus gros, » ajoute Derocher.
Les ours biens en chair ont plus de chances de survivre à un été dépourvu de glace pendant lequel la nourriture se fait rare ou est totalement absente. Les femelles les plus grosses ont besoin d'énergie pour mettre bas puis élever des oursons en bonne santé. « Aucun ours polaire ne s'est un jour regardé dans une mare d'eau de fonte en pensant : je suis trop gros, » plaisante Derocher.
Nous savons depuis longtemps que la mer de glace est une plateforme importante pour les ours polaires, indispensable pour chasser et élever les oursons. Ce que nous venons de découvrir en revanche, c'est l'importance de la glace, qui à elle seule constitue une source précieuse d'énergie.
Selon une étude publiée en 2018 par le journal PLoS ONE, plus de 70 % du régime des ours polaires peut être rattaché à l'algue qui pousse sous la banquise. C'est du moins le cas pour trois populations d'ours polaires vivant dans le nord du Canada
UNE CHAÎNE ALIMENTAIRE GLACÉE

Vous imaginez peut-être la banquise comme une vaste étendue de glace morcelée. C'est en effet ce à quoi elle ressemble vue d'en haut. Mais vue d'en dessous, la mer de glace est recouverte d'un tapis vert-brun composé de diverses espèces d'algues, les diatomées.
Si à présent vous imaginez de puissantes mâchoires ne faire qu'une bouchée d'un repas glacé recouvert d'une substance visqueuse verdâtre, vous n'y êtes toujours pas. Les ours polaires ne mangent pas directement la banquise. En fait, les chercheurs ont découvert que la majorité du régime des ours polaires se compose de créatures qui, elles, dépendent des algues de la banquise. Leur étude s'est intéressée aux ours polaires des baies de Baffin, d'Hudson Ouest et d'Hudson Sud.
Le régime des ours blancs est en grande partie composé de phoques et, dans certaines régions, de bélugas. Les phoques comme les bélugas se nourrissent de poissons et d'autres animaux qui tirent leur énergie de minuscules organismes appelés zooplancton et ce sont ces organismes qui consomment les algues de la mer de glace. L'une des espèces préférées des ours polaires, le phoque annelé, se nourrit de toute une gamme de poissons et de crevettes dont le principal aliment est justement ce plancton « mangeur » d'algues.
Prises séparément, ces algues sont « plus petites que l'épaisseur d'un cheveu, » rapporte Thomas Brown, écologiste marin pour la Scottish Association for Marine Science. Mais ensemble, ces petites algues de la banquise ont un impact majeur sur les écosystèmes polaires.
Au pôle Nord, les hivers sont longs et sombres, à la fin de chacun d'entre eux la lumière du printemps stimule la croissance des algues, une réelle aubaine pour plusieurs minuscules créatures. Ces organismes baptisés copépodes, amphipodes et le fameux zooplancton peuvent alors savourer le copieux festin qui recouvre le dessous de la banquise. En été, lorsque la glace fond, l'algue coule. Les poissons friands de ces sédiments et les phoques amateurs de ces poissons sont les maillons qui viennent compléter la chaîne alimentaire dominée par l'ours polaire.
OURS SUR GLACE

Au fil des années, Brown a exploré les écosystèmes polaires de la tête aux pieds. En analysant les étoiles de mer et les oursins du plancher océanique, il a découvert qu'ils contenaient une substance chimique également présente chez les algues de la banquise. Ce qui indique qu'après une longue descente dans les abysses de l'Arctique, les algues ont fini leur course dans le régime alimentaire de ces organismes.
Ensuite, Brown et son équipe se sont mis à la recherche de cette substance chimique, baptisée IP25 en raison des 25 atomes de carbone qu'elle contient, comme marqueur biologique de la présence d'algues chez les ours polaires. Les scientifiques sont entrés en collaboration avec des représentants du gouvernement sur le territoire canadien de Nunavut et avec des Inuits qui leur ont fourni des échantillons de foie d'ours polaire chassés à des fins de subsistance. Les tests ont montré que le carbone provenant de la mer de glace et de ses algues occupait une place prédominante dans le régime du prédateur.
Derocher se réjouit des résultats de l'étude, il ajoute qu'il y a dix-neuf populations d'ours polaires à travers le continent Arctique et que donc logiquement, la prochaine étape sera d'étudier ces autres spécimens. Même si les écosystèmes sont robustes, poursuit-il, le retrait d'une de leurs composantes « modifiera avec le temps un même écosystème. » Il rapproche la mer de glace du sol fertile des écosystèmes forestiers : « C'est un substrat qui est essentiel pour l'écosystème tel que nous le connaissons. »
La mer de glace est déjà réputée être un habitat important pour les ours polaires. « Et si nous n'avions pas assez de recul ? Et si la banquise était encore plus importante que nous ne l'imaginons ? » interroge Brown. « Une banquise plus petite signifie un habitat plus restreint, non seulement pour les ours polaires mais également pour les micro-organismes de la mer de glace qui sont à la base de la chaîne alimentaire de l'ours polaire, » souligne-t-il.
Avec l'évolution du volume de banquise disponible, « nous devrions peut-être revoir notre évaluation de la menace qui pèse sur les ours polaires, » indique Brown. Il est encore trop tôt pour le savoir, mais une chose est sûre, la glace est source de multiples bienfaits pour les ours polaires, conclut-il.


Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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