8 août 2022

Tournesol, fleur nationale de l'Ukraine, pour Nathalie

Outre le blé, le maïs, et le colza, principales céréales exportées en masse depuis les ports d'Ukraine, une autre plante est très présente dans les champs ukrainiens, car ce pays exporte massivement l'huile de tournesol (ça c'était avant la guerre!).

La fleur du tournesol est devenue la fleur nationale de l'Ukraine : j'espère qu'elle plaira à Nathalie, même si des fourmis (un peu grosses) ont envahi cette belle plante que je lui adresse. 

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Les tournesols ukrainiens, riches en symboles
La fleur nationale de l’Ukraine apparaît toujours plus comme un emblème de résistance face à l’offensive russe. En 1996, elle était associée à l’abandon de l’arsenal nucléaire ukrainien. Et a servi à dépolluer les sols après la catastrophe de Tchernobyl

«Prends ces graines. Au moins, comme ça, quand tu seras mort sur notre sol, des tournesols pourront pousser autour de toi!» Une petite dame, bonnet de laine sur la tête, apostrophe, énervée, un soldat russe à Genichesk, dans la région de Kherson, au sud de l’Ukraine. Elle le presse de glisser les semences dans sa poche, puis tourne les talons. Sur les réseaux sociaux, la scène est devenue virale. L’audace de cette femme désarmée sidère, mais son geste rappelle aussi l’importance de cette fleur pour les Ukrainiens.

La First Lady aussi : depuis le début de l’offensive russe en Ukraine, le tournesol s’impose partout, comme symbole de résistance et de solidarité. Dans les cheveux des filles qui manifestent pour la paix, de New York à Paris. Sur les tracts, les habits, les pancartes ou les graffitis. Et même sur la manche droite de la robe bleue de la First Lady américaine, Jill Biden, lors du discours sur l’état de l’Union de son mari devant le Congrès. La veille, elle le portait, brodé, sur son masque anti-covid.

Le tournesol est la fleur nationale du pays, arrivée vers 1700 d’Amérique du Nord. L’Ukraine fournit, avec la Russie, jusqu’à 75-80% des exportations mondiales d’huile de tournesol, et rien qu’en 2020-2021 le pays en a cultivé 6,5 millions d’hectares, selon le Département ukrainien du développement agricole. L’Eglise orthodoxe a contribué à populariser la fleur: pendant le carême, l’huile de tournesol est vite devenue un substitut du beurre et de la graisse animale. Et les Ukrainiens sont très friands des graines.

«Voir le soleil briller à nouveau» : mais il y a surtout la scène de 1996. En juin de cette année, des responsables de la base de missiles de Pervomaysk, dans le sud de l’Ukraine, ont planté des dizaines de tournesols pour célébrer l’abandon par l’Ukraine du troisième plus grand arsenal nucléaire du monde, hérité lors de l’effondrement de l’Union soviétique en 1991. En présence des ministres de la Défense américain, russe et ukrainien.

«Il est tout à fait approprié de planter des tournesols ici à Pervomaysk pour symboliser l’espoir que nous ressentons tous de voir le soleil briller à nouveau», avait alors déclaré le ministre américain William Perry, debout sur une petite plateforme de béton dans l’ancien champ de missiles.

Des missiles nucléaires SS-19, prêts à viser les Etats-Unis, étaient enfouis sous terre à cet endroit précis, jusqu’à ce que l’Ukraine, à travers le Mémorandum de Budapest de 1994, renonce officiellement à son arsenal de plus de 1900 ogives, en l’échange d’une promesse qui résonne bizarrement aujourd’hui. Les pays signataires s’étaient engagés à «respecter l’indépendance, la souveraineté et les frontières existantes de l’Ukraine». Et à «s’abstenir de recourir à la menace ou à l’emploi de la force contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de l’Ukraine». Ils ont aussi promis qu’aucune de leurs armes «ne sera jamais utilisée contre l’Ukraine, sauf en cas de légitime défense ou autrement, conformément à la Charte des Nations unies».

Multiples vertus : Fallait-il voir dans ces ministres usant de leurs pelles pour planter des tournesols avant tout une formidable opération de communication version «flower power»? Pas seulement. Car des scientifiques s’accordent aussi à dire que ces végétaux ont quelques vertus.

C’est ce que rappelle notamment, sur un blog, Richard Niesenbaum, professeur de biologie à l’université privée de Muhlenberg (Pennsylvanie). Si la plante «heureuse», dont il existe 67 espèces, a des graines aux valeurs très nutritives, des pétales comestibles, des tiges qui peuvent être utilisées pour fabriquer du papier ou des vêtements, et des feuilles qui peuvent être bues en infusion et soulageraient notamment «les fièvres, la diarrhée et les affections pulmonaires», ses racines ne sont pas en reste: elles auraient des propriétés pour éliminer les radiations des sols.

«Cette technique a été utilisée pour nettoyer la catastrophe nucléaire de Tchernobyl en Ukraine en 1986. Les racines de tournesol sont également employées en phytothérapie pour traiter les morsures de serpent et d’araignée», écrit Richard Niesenbaum. Des tournesols ont par exemple aussi été plantés en 2011 dans le village japonais d’Iitate, après l’accident nucléaire de la centrale de Fukushima, pour dépolluer les sols contaminés.

Amour inconditionnel : Le tournesol est désormais avant tout associé à la guerre en Ukraine déclenchée le 24 février par le président russe Vladimir Poutine. «La principale raison pour laquelle ce type de symboles peut devenir le signe d’une résistance populaire est qu’il n’est lié à aucun parti politique ou idéologie. D’autres symboles ont été utilisés plus tôt dans l’histoire par un camp et sont donc entachés, commente Orla Vigsö, professeur en communication à l’Université de Göteborg (Suède). Le tournesol est traditionnellement considéré comme un symbole de foi inébranlable et d’amour inconditionnel, qui sont des sentiments positifs, au-dessus du spectre politique. Une vaste résistance populaire peut donc se l’approprier. Si le symbole a un lien naturel avec le pays, cela renforce la possibilité qu’il soit accepté par une large base.»

Le tournesol s’invite notamment dans Les Fleurs de soleil du survivant de l’Holocauste et chasseur de nazis Simon Wiesenthal. En 1942, alors qu’il était interné dans un camp de travaux forcés polonais à Lemberg, il passait chaque jour devant un cimetière militaire. Sur chaque tombe de soldat nazi, il y avait un tournesol. Simon Wiesenthal était alors hanté par sa propre mort. Mais il se doutait que, le moment venu, il n’aurait pas droit à un tournesol. L’Ukrainienne qui a interpellé un soldat à Genichesk avait-elle ce livre en tête lorsqu’elle a suggéré au Russe qui se dressait devant elle de glisser des graines de tournesol dans sa poche?

Extrait d'un article de Valérie de Graffenried du 17 mars 2022 publié dans le journal Le Temps (Suisse)

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