Pour les 170 ans de l'émission du premier timbre-poste français, j'ai choisi pour Fred cet animal qui vient du fond des âges, présent déjà au temps des dinausaures et qui risque d'être bientôt éradiquée de la planète, tant pour les espèces terrestres, marines ou d'eau douce.
Céramique raku créée par la céramiste Marik Korus, visible sur son site |
Je t'en souhaite une bonne réception, Fred, ainsi qu'un bel été!
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LES TORTUES
SONT EN TRAIN DE DISPARAITRE ET C'EST TRES MAUVAIS SIGNE POUR L'HUMANITE
Elles
ont survécu au cataclysme tueur de dinosaures, mais elles risquent de ne pas
survivre à l'humanité. Sans elles, des écosystèmes sont menacés.
Le
lièvre a gagné, il va falloir récrire la fable de La Fontaine. La tortue fonce
en effet et à pas de géant vers l'extinction. Certaines sont au bord du
gouffre, comme la tortue à carapace molle du Fleuve Bleu, qui ne compte
plus que quatre individus survivants dont une seule femelle qui n'a jusqu'ici produit aucun œuf fertile.
Dans
l'archipel des Galapagos, sur l'île de Pinta, "Georges le Solitaire"
fut le dernier représentant de l'espèce Chelonoidis abingonii. Il s'est
éteint sans descendance en juin 2012. Ces
deux exemples, révélateurs, ne sont pas des cas isolés. Au printemps, la
coalition pour la préservation des tortues (un regroupement
d'associations) a distingué les 25 espèces les plus menacées dans un
rapport alarmant.
LES
PLUS MENACEES DES VERTEBRES ? Pire encore, sur les 356
espèces terrestres et marines de tortues modernes, 61% sont soit en danger soit
déjà éteintes, confirme une étude qui vient d'être publiée dans la revue
"BioScience".
"Les
tortues sont parmi les plus menacées des groupes majeurs de vertébrés,
davantage que les oiseaux, les mammifères, les poissons et même que les plus
assiégés, les amphibiens", assure l'équipe emmenée par Jeffrey Lovich, du
centre des sciences biologiques de l'USGS (institut d'études géologiques des
Etats-Unis).
Le
responsable ? Ce n'est bien sûr pas la fatalité, ni même le seul changement
climatique. L'espèce humaine dans son ensemble, depuis ses plus lointains
ancêtres, a participé à l'élimination des tortues. "Leur destin est
particulièrement tragique à la lumière de leur statut de parangon du succès
évolutionnaire", regrettent les scientifiques.
De
fait, les tortues, qui étaient là avant les dinosaures, ont survécu au
cataclysme qui les a effacés de la surface de la planète.Mais
l'arrivée des hominidés a marqué le début de leur déclin. Déjà, il y a 2,6
millions d'années en Afrique, des représentants de la lignée humaine ont
sur-utilisé les tortues comme moyen de subsistance. Si l'on compte toutes les
espèces de tortues terrestres ayant existé depuis le début du Pleistocène (qui
marque l'essor du genre Homo), on s'aperçoit que 69 d'entre elles ont disparu,
sur 121.
Ce qui disparaîtra avec elles :
Cela
peut paraître moins évident, mais les tortues sont aussi des pollinisatrices en
dispersant les graines de diverses espèces de plantes, pour certains
végétaux qu'elles consomment et dont les graines, qui ne sont pas détruites par
le processus de digestion, sont ensuite expulsées, elles peuvent même être le
pollinisateur principal.
Leur
rôle dans le cycle de distribution des minéraux est, lui aussi, peu connu.
Ainsi, en creusant le sol, la tortue du désert va consommer du
carbonate de calcium, notamment lors de la saison de la nidification. Pour
d'autres, ce sera du phosphore. Et après leur mort, leurs os contenant des
concentrations importantes de ces minéraux vont servir à la fois aux végétaux
et à certains animaux souffrant de déficiences.
Ces
capacités à concentrer des éléments va aussi en faire d'excellents
"indicateurs de pollution" : on retrouve chez elles de fortes doses
de composés toxiques et, en Amérique du Nord, on les considère comme des
témoins efficaces de contamination au mercure et même à la radioactivité en
milieu aquatique.
En
s'aménageant des terriers, certaines tortues créent des habitats utilisés par
d'autres espèces. Aux Etats-Unis, la tortue gaufrée creuse de grands
trous, qui peuvent atteindre jusqu'à une dizaine de mètres de long. Les
monticules de terre à l'entrée deviennent un habitat de choix pour certaines
plantes qui vont accroître la diversité végétale. Les terriers eux-mêmes
deviennent les refuges de centaines d'espèces : araignées, insectes, serpents,
amphibiens, et même des lapins et des renards. Le fait de remuer le sol va
aussi l'enrichir, le mélanger, le rendre plus vivant, contribuer à la
régulation de l'érosion...
Aujourd'hui,
les menaces sur leur survie sont nombreuses. Certaines tortues marines sont prises
accidentellement dans les filets des pêcheurs ou dans nos débris flottants.
Malgré leur protection théorique, certains recherchent toujours leurs œufs,
leur carapace, leur viande, ou les capturent pour les vendre aux aquariophiles.
Bien
sûr, le réchauffement climatique joue un rôle, d'autant plus que la
détermination sexuelle de certaines espèces dépend des conditions
environnementales et qu'un changement peut les perturber. La destruction de
leur habitat, enfin, pourrait être le dernier clou sur leur cercueil.
Des
prairies transformées en marais stériles : On
pourrait se contenter de s'attrister. Se dire que bien sûr, il faut enrayer
les extinctions de masse, mais que d'une certaine manière, cela ne nous touche
que de très loin. Erreur. Dans le cas des tortues, ce sont des éléments
importants de nos écosystèmes qui sont en danger.
Les
auteurs de l'étude expliquent : "Les tortues peuvent être des acteurs
majeurs dans les chaînes alimentaires des écosystèmes car elles peuvent être
herbivores, omnivores et carnivores."
Prises
dans leur ensemble, elles vont influer sur les autres organismes vivants,
structurer les habitats. La tortue aquatique Malaclemys terrapin qui vit
sur les côtes d'Amérique du Nord, se nourrit de bigorneaux des marais, des
mollusques d'eau salée dont elle régule la population. Sans elle, ces
bigorneaux peuvent transformer des paysages de prairies productives en
marécages salées et en vasières stériles en l'espace de seulement
huit mois.
Lorsqu'elles
sont en grand nombre, certaines espèces peuvent même constituer un apport
considérable à la biomasse de leur environnement : adultes et œufs
constituant une source de nourriture non négligeable pour de multiples autres animaux.
Et parce que certaines se nourrissent dans l'eau et que leurs œufs sont
consommés par des créatures terrestres, elles jouent aussi un rôle de transfert
d'énergie entre le milieu aquatique et la terre ferme.
"Les
tortues contribuent à la santé de nombreux environnements, y compris les
déserts, les zones humides, les écosystèmes marins et d'eau douce, et leurs
déclins pourraient conduire à des effets négatifs qui ne seraient pas
immédiatement visibles sur d'autres espèces, y compris les humains," explique
Jeffrey Lovich.
"L'importance
écologique des tortues, spécialement les tortues d'eau douce, est sous-estimée,
et elles sont généralement peu étudiées par les écologistes," renchérit
Josh Ennen, de l'institut de conservation de l'aquarium du Tennessee (USA),
co-auteur de l'étude. "Le taux alarmant de disparition des tortues
pourrait profondément affecter la manière dont les écosystèmes fonctionnent
ainsi que la structure des communautés biologiques autour du monde."
Pour
Mickey Agha, de l'université de Californie Davis, qui a également participé à
l'étude, "nous devons prendre le temps de comprendre les tortues, leur
histoire naturelle et leur importance pour l'environnement, ou nous risquons de
les perdre pour une nouvelle réalité dans laquelle elles n'existeront
plus." Une bien triste réalité qu'il faudrait rapidement tenter
d'empêcher.
Article publié en 2018 par
Jean-Paul Fritz (nouvel Obs)
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