Comme annoncé hier, je viens de poster une série de 40 mailarts sur le thème de la fermeture croissante du petit commerce en milieu rural et dans les petites villes que j'ai nommée "Petit commerce en péril" (PCP).
Tous sont tous destinés à la manifestation artistique organisée du 11 au 19 mai prochain par Tony Mazzochin, à la Poste de Saint-Geoire-en-Valdaine, avec l'ouverture exceptionnelle de sa Postenomade sur le thème : "les commerces ferment, moi je LOUVRE".
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Et comme à chaque série que je créée, j'aime garder un souvenir du travail effectué en m'envoyant une carte d'art postal. Voici donc le mail-art, hors série, que je me destine.
Vitrine :d’après la série photographique « J’habite une
ville fantôme » de Thibaut Derien
Personnage: Santon de provence Cantana
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Il s'agit du commerce d'un peintre-vitrier qui n'existe plus tellement sous cette forme artisanale avec ses produits à vendre en boutique.
De nos jours, les matériaux pour la peinture sont diffusés dans les grandes surfaces du bricolage, les fenêtres arrivent toutes vitrées en usine (à cause du double ou triple vitrage qui nécessite l'injection d'un gaz entre les couches de verre). Quant aux peintres, ils travaillent à plusieurs au sein d'entreprises spécialisées en peintures et ravalements, d'une taille bien plus conséquente.
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Je tiens tout particulier à saluer le travail de photographe documentaire de Thibaut Derien
dont je me suis partiellement inspirée pour élaborer cette série.
Thibaut DERIEN
Thibaut Derien photographe, est né en 1974 à Lorient. Il pratique la photographie depuis le lycée.Auteur et interprète de quatre albums de chansons, c’est lors de ses tournées que sa série « J’habite une ville fantôme » voit le jour. Il a désormais troqué la musique et les mots pour le silence et l’image et se consacre pleinement à la photographie. Il vit et travaille dans sa ville fantôme.
La galerie Parallax , lieu d'art dédié à la photographie contemporaine à Aix en provence, présente sa série « J’habite une ville fantôme" d''une bien jolie manière. Je vous laisse apprécier.
Thibaut Derien a commencé à parcourir la France il y a dix ans, évitant à dessein les grands axes de circulation et ses sorties bordées par des kilomètres de panneaux criards, d’insipides préfabriqués,de lotissements uniformes et de ronds-points à donner le tournis, que des années de politiques urbaines négligentes ont imposé comme les nouveaux standards esthétiques des zones périurbaines.Il est parti à la recherche des rares petits commerces encore debout mais bel et bien abandonnés,témoins d’une époque, d’un métier, d’un goût, d’une mode.
Des petits commerces désertés,laissés aux aléas du temps, qu’il a sélectionnés avec attention parmi la multitude trouvée sur sa route, pour l’émotion singulière qui s’en dégageait, et qui lui ont inspiré cette ville fantôme observant impuissante l’animation de centres commerciaux impersonnels, là-bas, au loin. Pas si loin.
Ces petits commerces peuplent la ville fantôme de Thibaut Derien, formant un cimetière, un varia de traces, de vestiges d’une époque révolue, balayée par les industriels, les franchises et l’indifférence de clients envoutés par les sirènes de la consommation de masse et ses temples de tôle et de parpaings.
Dans ce cimetière de boutiques, les rideaux sont baissés, tirés, les portes scellées,les fenêtres murées. Les devantures étouffent dans un cadre strict, carré, qui éclipse tout le reste.
On retrouve dans ces photographies la frontalité de Walker Evans et d’Eugène Atget, qui avant lui ont immortalisé des petits commerces en voie d’extinction.
Mais la frontalité de Derien est, elle, poussée à l’extrême, réduisant les boutiques à leur seule façade, excluant toute profondeur de champ, anéantissant les volumes susceptibles de réanimer ces ruines exsangues et réduisant au silence ce qui faisait la particularité de ces commerces de proximité : le lien social. Une frontalité pure qui bouche la vue du spectateur et lui fait violemment ressentir la fin.
Tellement qu’on se surprend à penser qu’après tout, ces petits commerces ne sont peut-être qu’une illusion, des décors de cinéma dont les façades peintes seraient soutenues par de simples échafaudages. Comme si on préférait croire que tout ça n’était qu’un rêve.
Les plus optimistes, eux, laisseront leur imagination vagabonder. Car cette frontalité qui garde le minimum d’informations, confère aussi une valeur générique et une sorte de virginité aux boutiques : des milliers d’histoires peuvent s’écrire derrière ces façades désolées.
Passée l’angoisse de la fin et du vide, on se laisse malgré tout charmer par la beauté des lignes, des mots, des matières, des typographies, des ouvertures, des fermetures, des formes et des couleurs de ces boutiques.
Et de ces vitrines vides, orphelines, se dégagent tout à coup une émotion et même une certaine vitalité. Celle du passé, celle que notre imagination se surprend à inventer.
Thibaut Derien appartient à une famille de photographes qui font de la photographie documentaire un art, de la trivialité du quotidien, un poème, et qui constatent avec effroi les mutations de notre société, ses laideurs contemporaines et ses splendeurs passées.
Sa ville fantôme nous dévoile les ruines d’une société qui n’existe plus, nous met face à nos responsabilités et nous révèle à la fois la beauté qui se dégage de ses décombres.
2 commentaires:
Bravo à Thibaut DERIEn et à toi pour cette incroyable série qui va faire le bonheur de l'exposition !
Quelle extraordinaire série! Bravo.
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