25 octobre 2021

Brassens, hommage en retour, par Sam l'épistolière

Ah comme je suis heureuse de recevoir une bien jolie réponse d'une toute nouvelle correspondante, qui,  tout comme moi, apprécie Brassens et lui rend un bel hommage à sa façon. 

Elle a choisi d'illustrer plus particulièrement la chanson le parapluie : j'aime la silhouette dessinée de l'artiste avec sa guitare, son pépin, sa pipe et son célèbre perroquet sur l'épaule, comme sur la photo centrale. 

J'aime particulièrement le calligramme parapluie avec la petite botte dans la flaque d'eau... on voit là qu'on a affaire à une "femme de lettres".

Et pour finir en beauté, Sam m'adresse le texte du billet de François Morel, raconté sur les ondes de France Inter le 22 octobre dernier, jour même du centenaire de la naissance du grand Georges. Le voici, intégralement :

Certains morts interrogent : qu'est-ce qu'ils auraient dit ? Comment auraient-ils réagi s'ils étaient encore vivants ?

Qu'auraient pensé Coluche, Pierre Desproges, du pass sanitaire, du port du masque, de la pandémie, d'Éric Zemmour, du réchauffement climatique ?

Comment s'y seraient-ils pris pour continuer à rire des catastrophes successives, effective ou annoncées ?

Bah on en sait rien. Faire parler les morts est toujours périlleux. Faire parler les morts doit susciter la méfiance.

Regardez ceux qui, aujourd'hui, se croient autorisés à parler à la place de Jésus, de Dieu, du prophète, de Mahomet.

S'il y a bien un mort qu'on ne peut vraiment pas faire parler, c'est Georges Brassens

Déjà de son vivant, il n'était pas si facile à interroger. Il n'était pas du genre à se répandre. On imagine qu'aujourd'hui, même pour une rentrée à Bobino, même pour la sortie d'un disque, il ne tweeterait pas. Il ne likerait pas. Il ne buzzerait pas.

95 fois sur 100, les followers s’emmerdent en buzzant

Brassens n'aurait parlé ni de Macron, ni de Zemmour, ni de Mélenchon, comme de son vivant il n'a jamais évoqué Lecanuet, Le Pen ou Georges Marchais. Il a parlé de Martin, de Margot, de Jeanne, d'Hélène, du vieux Léon et de la femme d'Hector… mais de ceux qui faisaient les gros titres des journaux : jamais.

Entre nous, ce n'était pas tout à fait de son niveau. Lui parlait des humbles, des copains, des modestes. Lui parlait d'amour, d'amitié, de liberté.

Il n'aurait pas parlé du repliement sur soi, du nationalisme. Il aurait évoqué "les imbéciles heureux qui sont nés quelque part" et aurait levé son verre en l'honneur de "l'Auvergnat qui lui donna du feu".

Georges Brassens a 100 ans aujourd'hui même

Il est toujours le même : ni Dieu, ni maître. Ou alors pour faire plaisir à Charles Trénet, dieu du stade et maître-nageur.

Lorsque Laurent Gerra l'imite, il commence systématiquement ses phrases par "Je pense, mais je peux me tromper"… C'est vrai que ça lui va bien : Brassens n'avait pas besoin d'être péremptoire pour exprimer sa pensée.

Vous imaginez à la télé des débats qui commenceraient par "Je pense, mais je peux me tromper" ? Aujourd'hui, on assène plus qu'on pense, on n'imagine jamais qu'on pourrait se tromper.

S'il y a bien un mort qu'on ne peut vraiment pas faire parler, c'est Georges Brassens. Sauf dans ses chansons, où il a dit tout ce qu'il avait à nous dire : gloire à qui, n'ayant pas d'idéal sacro-saint, se borne à ne pas trop emmerder ses voisins.

Ce soir à Sète, à 21h, on fait la fête à Brassens.

Entre nous, ça peut être tous les soirs, n'importe où, chaque fois qu'on a envie de célébrer le mariage du swing et de la poésie, de la mélancolie et de la joie, de la liberté et de la fraternité.

Bon anniversaire, Georges
.

Souffrante, je n'étais pas à l'écoute ce jour-là mais je vais aller me rattraper bien vite : je sais combien François Morel aime et admire ce poète, d'ailleurs il était présent à Sète en compagnie de Yolande Moreau pour un spectacle hommage. 

Décidément, Sam, nous avons pas mal de goûts en commun, je te remercie infiniment pour ce premier bel échange. 

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