8 août 2022

Motanka, la poupée en tissu talisman d'Ukraine

On considère que cette poupée a été créée il y a cinq mille ans, et que cette tradition est désormais répandue dans le monde entier.

En Ukraine, ce personnage est énigmatique et est censé porter bonheur ; il s’agit d’un talisman qui protège de tous les maux. Motanka est une poupée, créée en tissu. Etymologiquement, le terme provient du verbe « мотати » (enrouler). 
photos publiées sur petitepointplace.tumblr.fr
La poupée Motanka est devenue une partie intégrale de la culture populaire en Ukraine. Dans le temps où les gens faisait tout de leurs mains, nombreuses étaient les raisons de la confection d'une poupée motanka. Un véritable must de la maison, elle devait servir à des objectifs différents, tel que bon déroulement de chaque cycle dans l'agriculture, prospérité du foyer, santé et bien-être de la famille, réussite, amour, fertilité, etc ... Créée en douceur, sans couture (ni ciseau ni aguille), avec seulement les pensées positives :), en privilégiant de matériaux naturels, souvent en recyclant les vielles tissues/broderies faites par les grands-mères, poupée Motanka était crédible dans son rôle du talisman-protecteur. Les poupées Motanka étaient aussi les jouets pour les enfants.
Photos publiées sur le site https://three-snails.com/blog/post/doll-motanka-the-overpowering-guard-that-defeated-the-time
Lorsqu’une personne créait une motanka, le but était de voir un souhait se réaliser. Le souhait pouvait être d’ordre général (être en bonne santé, heureux, avoir un sort chanceux…) mais parfois les poupées étaient conçues à des fins plus spécifiques pour guérir une personne d’une maladie ou appeler la pluie par exemple. Suite à un rituel particulier pratiqué autour de la motanka, elle était brulée ou noyée, en tant que don aux dieux pour que la demande se réalise.

Matières et aspect : pour fabriquer une motanka, il faut enrouler des tissus liés entre eux par des nœuds sans utiliser d’aiguille, ce qui explique son aspect arrondi. L’intérieur du corps est composé de matériaux naturels : paille, bois, herbes, feuilles séchées ou graines.
Une des spécificités de cette poupée est l’aspect de son visage vide, sans aucun trait. L’absence de visage est liée au côté spirituel ; en effet n’ayant pas de visage, elle est pourvue de toute existence physique et par conséquent elle ne peut pas provoquer de malheur. Selon les croyances, les personnes qui rajoutaient les yeux, les lèvres ou le nez sur une motanka mourraient avec elle, car leur âme se déplaçait dans la poupée. Néanmoins une croix était parfois présente sur le visage de certaines poupées afin d’ajouter une signification sacrale.
 photos publiées sur https://forum-ukrainien.forumactif.org
Plusieurs détails peuvent être ajoutés sur la poupée et ils nous donnent des informations supplémentaires sur cette dernière. Par exemple, si une motanka est habillée d’une serviette couvrant sa tête, cela signifiera qu’elle est mariée.

Traditionnellement la motanka est habillée d’une chemise blanche brodée et d’une jupe. La jupe signifierait la terre lorsque la chemise représenterait trois états du temps : passé, présent et futur. Les créateurs de chaque région ajoutent des éléments particuliers, des décorations sur la chemise ou des bijoux.

Personnages : les personnages principaux représentés sont le bébé, la mariée, et la baba (grand-mère) protectrice.
  • Une motanka bébé était faite pour la naissance ; elle était placée dans le lit du nouveau-né afin de protéger son sommeil. Si un enfant était malade, les parents lui donnait jouer avec motanka puis brulaient ou noyaient la poupée pour conjurer le sort.
  • Une motanka mariée était offerte aux femmes qui se mariaient pour les protéger dans leur nouvelle vie de famille et pour détourner le mauvais œil.
  • Une motanka baba devait veiller au bonheur de la famille. Elle était composée de monnaies, de graines et de coton afin que la famille ait des moyens suffisants.

Si vous avez envie de vous exercer à cet art et de fabriquer une motanka, le détail est donné ici, photos à l'appui pour chacune des étapes sur le site J'aime l'Ukraine, que je fréquente beaucoup en ce moment. C'est une expérience qui me tente assez, je l'avoue, car cette activité réunit touts ce que j'aime, entre broderies et costumes traditionnels, du tissu et des fils.

 Source : le Site j'aime l'Ukraine et Ivanna Piniak de l'Amicale du Conseil de l'Europe

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L'épopée des Motankas, à travers l'Europe depuis mai 2021

La Journée de l'Europe réunie était une occasion parfaite pour révéler sa puissance interculturelle. Dans le projet artistique international, intitulé "Poupées Motankas ukrainiennes parcourent le monde" et dédié spécialement à la Journée de l'Europe, 37 artistes résidant en Ukraine, en France, en Allemagne, en Norvège, au Portugal et en Brésil ont réalisé environ 60 créations autour de la poupée Motanka, chacune en tenue traditionnelle des différents pays européens.

Cette collection a été présentée pour la première fois le 9 mai 2021 dans un film "Ode à la joie" dont vous voyez un extrait ci-dessous.
Vidéo publiée sur youtube de Олена Черноус
En automne, la collection des Motankas est partie en tournée, 1 mois dans un musée de chaque ville- centre régional en Ukraine : à Tcherkassy en octobre, à Kyiv en novembre, à Tchernivtsi en décembre, à Ujhorod en janvier 2022, à Mykolaiv en février ... le 24 février, la Russie a lancé une guerre à pleine échelle contre l'Ukraine, contre l'Europe, la ville de Mykolaiv a subi les bombardements, les poupées ont été descendue au sous-sol avec les organisateurs de l'exposition.

Evacuées à Bremen en Allemagne, sauvées et restaurées par une artiste et co-organisatrice du projet Tetiana Zolochevska, les poupées Motankas en tenues des pays européens ont pris la route vers Strasbourg, la capitale européenne de la démocratie et des droits de l'homme. Une belle surprise pour leurs créatrices et créateurs, restés en Ukraine ou devenus réfugiés, qui se battent et qui résistent dans leurs villes, ou qui se sont déplacés ailleurs pour continuer le combat, la création, le bénévolat, dans un but commun de la liberté, de la victoire, pour un avenir meilleur en Europe.

Du 6 au 8 mai 2022, dans la Grande Salle de l’Aubette à Strasbourg se tient une exposition de motankas: poupées ukrainiennes dans les costumes des pays européens…

La présentation aura lieu le 6 mai à 20h00 à l’Aubette lors de l’événement Solidarity Ukraine, après une conférence et avant un concert. Un grand merci à toutes les personnes qui ont sauvé, évacué cette collection unique de Mykolaïv, sous les bombes russes, restaurée et envoyé à Strasbourg ! Le mari de Valentina Vasilieva, l’une des artistes, a parcouru 300 km sous le feu des militaires russes pour sortir et sauver la collection de poupées Mykolaiv, l’emmener dans un endroit plus sûr …. 

Les poupées qui ont pu être sauvées

Tatiana Zolotchevskaya, l'artiste qui a contribué à la restauration des poupées

Vous demandez comment le peuple ukrainien parvient à résister , vaincre ce terrible ennemi ? L’amour est plus fort que la mort, l’art est au cœur de la résistance, une telle nation ne peut être vaincue par personne ! Cette photo montre la collection, soigneusement restaurée, organisée et envoyée par Tatiana Zolotchevskaya, notre merveilleuse artiste et organisatrice de Brême.

Source : Le site PromoUkrainia- Article du 6 mai 2022 publié par Olena Dmytrenko

3 août 2022

Kateryna Bilokur, une femme peintre ukrainienne de talent

 Kateryna Vassilivna Bilokur (en ukrainien : Катерина Василівна Білокур)
est une artiste peintre ukrainienne, maître de la peinture décorative folklorique, représentant du "folk primitif" ("art naïf"). née le 25 novembre (ou 7 décembre 1900) dans le village de Bogdanivka, district de Pyriatyn, province de Poltava dans l'Empire russe et décédée le 10 juin 1961 dans le village de Bogdanivka, district de Yahotyn, Oblast de Kiev en République socialiste soviétique d'Ukraine.

Biographie

Kateryna Bilokur est née dans le village de Bohdanivka, district de Pyryatinsky, province de Poltava (aujourd'hui district de Yagotynsky, région de Kyiv). La date de naissance n'est pas certaine : le 25 novembre ou le 7 décembre  1900. On pense que cette hypothèse de la date de naissance exacte de l'artiste est due au fait que l'église célèbre ce jour-là le jour de la sainte grande martyre Catherine, en l'honneur de laquelle la jeune fille a été nommée.

Kateryna a appris à lire vers l'âge de 6-7 ans. Son père et son grand-père l'ont d'abord aidée dans cette tâche et ont été extrêmement surpris par le zèle et le succès de la fille. Par conséquent, la famille a décidé de ne pas envoyer Kataryna à l'école, car elle sait déjà lire, et l'économie sur les vêtements et les chaussures est énorme. Il vaut mieux la mettre derrière un rouet. Cela a grandement affecté le sort de Kateryna, car cela l'a empêchée de suivre une quelconque formation artistique et même d'organiser des expositions de peintures - partout où elle devait avoir un document sur son éducation. 

Il est difficile de dire exactement quand le futur artiste a commencé à dessiner, mais probablement dans l'enfance. Elle dessine au fusain sur des morceaux de toile. À l'âge de 14 ans, Kateryna a été surprise en train de faire ce que ses proches pensaient être une activité ridicule et il lui était strictement interdit de dessiner. Depuis lors, la fille a dû dessiner en secret.

Selon diverses sources (selon une version - dans le calendrier, selon une autre - dans le magazine "Soviet Word"), en 1922 ou 23, Kateryna Bilokur a entendu parler de l'école technique de céramique artistique de Myrhorod. Même le mot "céramique" ne lui était pas familier, mais le mot "artistique" était compréhensible. Après avoir quitté Bohdanivka pour la première fois, Kateryna Bilokur se rend à Myrhorod. Ses bagages se composaient de deux dessins: "une copie d'une image" et un croquis de la maison de son grand-père d'après nature - réalisé non pas sur toile, mais sur papier spécialement acheté pour cette occasion. Les dessins pourraient indiquer que la fille a vraiment assez de talent pour entrer dans une école technique. Mais la conversation à l'école technique de Myrhorod s'est terminée immédiatement, dès qu'il s'est avéré que la fille n'avait pas terminé la septième année. Ils n'ont même pas regardé les dessins de Kateryna.

Kateryna ne s'est pas effondrée, elle n'a pas arrêté de peindre, quoi qu'il arrive. Elle s'est mise au travail encore plus assidûment, dans l'espoir de réessayer. En 1928, elle décide à nouveau de s'y essayer. Cette fois à l'école technique de théâtre de Kyiv. Cependant, même ici, la conversation s'est terminée sur le document sur l'éducation scolaire.

Après un nouvel échec, Katria Bilokur a été forcée de maîtriser elle-même le métier difficile d'artiste. Les dessins au fusain sur des morceaux de toile appartiennent au passé. Dans le passé, il y avait aussi des peintures créées avec des peintures faites maison sur du carton et du contreplaqué. Elle a toujours travaillé peu et à contrecœur avec des aquarelles et des crayons. L'artiste était le plus attiré par les peintures à l'huile. Ils lui semblaient éblouissants, même leurs noms sonnaient fabuleux : cinabre clair et rouge foncé, bleu foncé cobalt, outremer, rouge cadmium, rose foncé kraplak... Ce sont ses couleurs préférées. Elle a fait les pinceaux elle-même - elle a choisi des poils de la même longueur de la queue du chat : 9, 12 ou 36. Un pinceau pour chaque couleur.

Après tout, Katra Bilokur avait des mentors dans la maîtrise de la peinture à l'huile. Quelqu'un lui a appris à apprêter la toile, car au début, elle a essayé de peindre directement sur la toile, mais les peintures se sont rapidement assombries et fanées. On pense qu'elle aurait pu être aidée par le professeur Ivan Hryhorovych Kalita, également artiste amateur et peintre d'icônes de Cmotryki, le seul artiste respecté par son père. En 1934, Katya Bilokur a peint le tableau "Birch" - l'un des trois tableaux qui lui ont valu une renommée mondiale. Un an plus tard, "Flowers over the mud" est né - un autre chef-d'œuvre célèbre.

1935 - Fleurs derrières la barrière de Kataryna Bilokur

L'année 1939 a déterminé le destin ultérieur de l'artiste. Lors d'une visite chez la sœur de Lyuba Tonkonig, Katya a entendu la chanson "N'y avait-il pas une viorne dans le pré?" à la radio, interprété par la célèbre Oksana Petrusenko. Frappée par le chant et la voix de Kateryna, elle envoie une lettre au chanteur. Oksana Petrusenko a été impressionnée par le dessin de la viorne sur un morceau de toile enfermé dans l'enveloppe avec la lettre. Elle consulte ses amis - Kasiyan, Tychyna, se rend au Folk Art Center, explique l'essence de la question. Une commande arrive à Poltava - aller à Bohdanivka, trouver Kaaryna Bilokur, se renseigner sur ses œuvres.

Volodymyr Khytko, qui était alors le chef du conseil artistique et méthodique de la Maison régionale des arts populaires, vient au village. Impressionné par les œuvres, il emmène plusieurs tableaux avec lui à Poltava, les montre à son collègue et ami, l'artiste Matviev Dontsov. Il a été décidé d'organiser immédiatement une exposition. Et en 1940, une exposition personnelle de l'artiste autodidacte de Bohdanivka Katataryna Bilokur s'est ouverte à la Poltava House of Folk Art, composée de 11 peintures.

Le succès est immense. Kateryna Bilokur est récompensée par un voyage à Moscou, dans lequel elle est accompagnée de Volodymyr Khytko. L'artiste visite la galerie Tretiakov, le musée Pouchkine, le musée Lénine. L'impression principale est celle des "petits Hollandais", des artistes itinérants et des impressionnistes français. Pendant quelque temps après ce voyage, elle ne put écrire. Mais après s'être calmée, elle écrit encore et encore des fleurs, ce qu'elle ne peut s'empêcher d'écrire, car il n'y a rien de mieux au monde qu'elles. En 1941, Katria Bilokur crée les célèbres "Fleurs des Champs".

Fleurs des champs (1941), Kateryna Bilokur
La guerre a commencé. En 1944, le directeur du Musée national des arts décoratifs populaires ukrainiens, est venu à Bohdanivka pour proposer une exposition et acheter des peintures. D'ailleurs, c'est grâce à ses efforts que ce musée possède la meilleure collection d'œuvres de Kataryna Bilokur.

Un à un, l'artiste crée ses célèbres tableaux - "Fleurs décoratives" (1945), "Bonjour à la moisson" (1946), "Champ de la ferme collective" (1948-1949), "Tsar Colosse" (1949), "Petit déjeuner " ("Le petit déjeuner") (1950). 1957), "Les pivoines" (1958), "Nature morte aux bleuets et à la cruche" (1958-1959), "Bouquet de fleurs" (1959)...

L'artiste a peint des fleurs toujours vivantes, de la nature, combinant souvent des fleurs de printemps et d'automne dans une seule image - une telle image a été créée naturellement, du printemps à l'automne. Elle a travaillé de manière désintéressée, mais pas pressée. Elle était une créatrice de paysages et de portraits.

En 1949, elle a été admise à l'Union des artistes d'Ukraine, en 1951, elle a reçu l'ordre "Insigne d'honneur", elle a reçu le titre d'artiste émérite d'Ukraine et en 1956 - Artiste du peuple d'Ukraine. Les œuvres de Kateryna Bilokur sont régulièrement exposées lors d'expositions - à Poltava, Kyiv, Moscou et d'autres villes.

Le rêve de déménager à Kyiv n'est resté qu'un rêve. Ces dernières années, elle était gravement malade, il y avait des signes de la vie rurale de cette époque, une vie personnelle instable, la maladie de la mère. L'artiste est décédé le 9 juin 1961. Et en 1977, un musée commémoratif de Kateryna Bilokur a été ouvert dans le village de Bohdanvtsi, sur le territoire duquel un monument a été érigé.

Musée Bilokur à Bohdanivka, extérieur et intérieur

L'œuvre de l'artiste du village de Bohdanivka est l'un des meilleurs trésors de la culture ukrainienne du XXe siècle, elle est devenue le sujet d'étude et de recherche des critiques d'art. Le Musée d'histoire et d'histoire locale Yagotyn a ouvert deux expositions avec son patrimoine pictural et graphique, et le Musée d'État des arts décoratifs populaires ukrainiens à Kyiv possède une grande salle "Bilokuriv" dans laquelle ses meilleures créations sont rassemblées. La compositrice Lesya Dychko a créé le ballet "Kateryna Bilokur" en 1983, mis en scène un téléplay du même nom (1980), le film documentaire "Le monde magique de Kateryna Bilokur" (1986) et le long métrage en deux parties "Buyna" (1989 ). 

Trois peintures de Bilokur - "Tsar Colossus", "Birch" et "Collective Farm Field" - ont été incluses dans l'exposition d'art soviétique à l'Exposition internationale de Paris en 1954. Pablo Picasso les a vus ici. Ses mots ont fait le tour du monde : "Si nous avions une artiste de ce niveau, nous ferions parler d'elle dans le monde entier !" Il a comparé Kateryna à un autre grand artiste autodidacte : Séraphine de Senlis 

Sources : http://ukrmystetstvo.blogspot.com/, http://www.mundm.kiev.ua/

Voici une vidéo publiée sur Youtube par Narquélion sur la création de Kataryna, hélas il n'y a pas de possibilité de traduction, même pas en anglais. 
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Le livre du critique d'art Olesya Avramenko "BILOKUR. BILOKUR"
/ Musée national des arts décoratifs populaires ukrainiens. Kyiv, 2020. 168 p. : illustrations
.
L'étude monographique est consacrée à la vie et au parcours créatif de l'artiste du peuple d'Ukraine Kateryna Bilokur (1900-1961).
Le travail de Kateryna Bilokur est considéré dans le contexte des tendances artistiques mondiales du XXe siècle. Conçu pour tous ceux qui s'intéressent au travail d'un artiste ukrainien exceptionnel, ce livre fournit une analyse professionnelle du travail créatif de l'artiste, met en évidence son destin difficile. 
La publication est dédiée au 120e anniversaire de la naissance de Kateryna Bilokur.

Séraphine Louis, bonne "à tout faire" et artiste-peintre de génie

La Poste française vient d'éditer un timbre en hommage à Séraphine Louis, dite Séraphine de Senlis, à l'occasion du 80e anniversaire de sa mort, avec son tableau "L'arbre de Vie".
J'en profite pour lui rendre un vibrant hommage, car cette femme était totalement tombée dans l'oubli jusqu'à ce qu'un réalisateur tourne un long-métrage sur son histoire. Sa peinture est maintenant reconnue et classée dans l'art naïf, mais sa vie n'a pas été un long fleuve tranquille.

à gauche, photo de Séraphine Louis, dans le catalogue de l’exposition Les Maîtres populaires de la réalité, Paris, 1937 
à droite, Séraphine Louis photographiée vers 1935 devant un bâtiment de l'hopital psychiatrique • © Musée Henri Theillou

Sans instruction, Séraphine Louis, femme de ménage à Senlis, a peint une centaine de tableaux entre 1905 et 1932. Découverte par un célèbre collectionneur d'art, elle jouira de sa notoriété très peu de temps avant de finir ses jours internée à l'hôpital psychiatrique de Clermont-de-l'Oise.
Fleurs dans un panier de Séraphine Louis, vers 1910,crayon, gouache et peinture dorée sur papier vergé,
n° Inv. A.00.5.689, musée d’Art et d’Archéologie, Senlis • © Irwin Leullier
En 1912, Séraphine Louis est embauchée comme femme de ménage chez Wilhem Uhde. Ce collectionneur, critique et marchand d'art, ami de Picasso et de Braque, a découvert Le Douanier Rousseau dans les années 1900. Pour lui, il est évident que Séraphine possède un immense talent pour la peinture. Seulement, en 1914, la guerre éclate. Wilhem Uhde, d'origine allemande, est contraint de quitter la France. En partant, il encourage Séraphine à persévérer dans cette voie, comme d'autres artistes autodidactes qu'il nommera plus tard les Primitifs modernes. 

"Elle refusait de parler de son art. Elle disait : « La peinture, c’est ma vie. C’est la lumière. Et pour vivre, il faut que je fasse des ménages ». Et elle appelait cela le travail noir", raconte en 1969, le docteur Gallot qui l'avait bien connue.

Séraphine Louis est née dans une famille modeste à Arsy dans l'Oise le 3 septembre 1864. Orpheline à l'âge de 7 ans, elle est élevée par sa sœur aînée avant d'entrer au Couvent de la Charité de la Providence à Clermont-de-l'Oise. De 1881 à 1901, elle y travaille en tant que domestique. Elle gardera de cette période de sa vie une très forte empreinte religieuse.

En 1906, Séraphine s'installe à Senlis où elle travaille comme femme de ménage dans de grandes familles bourgeoises. Quelques années plus tard, elle emménage dans un appartement situé 1 rue du Puits-Tiphaine. C'est durant cette période qu'elle commence à peindre. Elle dessine et peint sur de petites toiles, des panneaux de bois, des pots en terre cuite, du carton. Sur tout ce qu'elle peut trouver.

Les grenades de Séraphine Louis, vers 1915, huile et ripolin sur bois, n° Inv. A.00.5.352,
musée d’Art et d’Archéologie, Senlis • © Christian Schryve

"Elle n'a pas pris de cours, elle a commencé à peindre parce que son ange lui aurait dit de peindre", explique Alicia Basso Boccabella, responsable des publics au Musée d'Art et d'Archéologie de Senlis. Autodidacte, elle peint exclusivement des fruits et des fleurs, semble-t-il à partir de livres de botanique qu'elle trouve dans les foyers bourgeois. "Ses peintures sont très réalistes, elles s'ancrent vraiment dans la réalité. On les reconnaît très facilement aussi parce que les fruits flottent dans l'espace, ils ne sont pas posés sur une table comme chez Cézanne par exemple. On suppose donc qu'elle s'est inspirée des planches botaniques", décrit Alicia Basso Boccabella.

La nature comme seul maître

Treize ans plus tard, Séraphine produit désormais des toiles de plus grand format, pouvant aller parfois jusqu'à deux mètres de hauteur. Elle en présente six à l'exposition de la Société des Amis des Arts à l'Hôtel de Ville de Senlis. Installé désormais à Chantilly, Wilhem Uhde la retrouve et découvre cette évolution dans sa peinture. "De quelque chose de très réaliste, on est passé à quelque chose d'imaginaire. C'est toujours très symétrique, mais sa peinture est foisonnante, il n'y a plus aucun espace de libre sur la toile", précise  Alicia Basso Boccabella. 

Séraphine peint avec du Ripolin, une laque industrielle qui coule, l'obligeant ainsi à peindre par terre, à genoux. "Si l'on prend n'importe laquelle de ses œuvres, on remarque que chaque feuille a ses propres traits de pinceau. C'est très flagrant sur l'Arbre de vie. Elle ne laisse pas le Ripolin  sêcher donc il y a des craquelures et c'est aussi ce qui fait la spécificité de ses tableaux", décrit la responsable des publics du Musée de Senlis. Autre particularité de l'artiste, elle signe ses œuvres avant de peindre. "Elle signait S.Louis puis recouvrait la signature de couleur. On ne sait pas vraiment pourquoi elle faisait ça, elle ne parlait pas de ses œuvres", ajoute-t-elle. 

Les marguerites - 1925/1930

Si l'on parle d'art naïf aujourd'hui pour qualifier les œuvres de Séraphine Louis, une chose est certaine, celle-ci ne peignait pas pour rentrer dans des cases. "Elle n'explique pas pourquoi elle peint, comme vous n'expliquez pas pourquoi vous respirez. Elle peignait pour elle-même, elle ne donnait même pas de titre à ses tableaux, c'est Wilhem Uhde qui leur a donné des titres par la suite", explique Alicia Basso Boccabella. Lorsqu'elle peignait, Séraphine était guidée par sa croyance en Dieu, en particulier la Vierge Marie. "La légende dit qu'elle chantait, de manière très fausse d'ailleurs, des cantiques tout en peignant, sourit la responsable des publics au musée de Senlis. En tout cas, il y a une vraie mysticité dans ses tableaux. On pense qu'elle cherche à représenter une flore paradisiaque dans l'au-delà."

Les grappes de raisins,  vers 1930

En 1929, Séraphine est exposée aux côtés des Primitifs modernes lors de l'exposition Les Peintres du Coeur sacré à la galerie des Quatre-Chemins à Paris. La peintre acquiert ainsi une petite notoriété et de l'argent qu'elle a tendance à dilapider un peu trop. "Dans les années 30, Wilhem Uhde cesse de l'aider. Ne plus pouvoir peindre a créé chez elle une décompensation, c'est-à-dire un état de détresse subi", explique Alicia Basso Boccabella. Le 21 février 1932, après une forte crise psychotique, elle est internée à l'hôpital psychiatrique de Clermont-de-l'Oise. Séraphine est alors diagnostiquée comme étant atteinte de "psychose chronique avec idées de grandeur prédominantes, hallucinations auditives et idées délirantes imaginatives."

Durant ces années d'hospitalisation dans l'un des sites du centre hospitalier à Villers-sous-Erquery, Séraphine ne peint plus, mais écrit une quarantaine de lettres. "Ça part dans tous les sens, confie Goty Clin, vice-présidente de l'association culturelle des amis du CHI de Clermont. Elle écrit comme elle poserait des fleurs sur ses toiles. Ses lettres sont bourrées de fautes." Elle y décrit ses hallucinations et ses persécutions, mais aussi les mauvais traitements qu'elle subit. 

À l'instar de la sculptrice et peintre Camille Claudel, sa contemporaine exacte, Séraphine Louis meurt de faim dans un hôpital psychiatrique. Atteinte d'un cancer du sein et dans la misère la plus totale, elle meurt le 11 décembre 1942 dans l'annexe de l'hôpital à Villers-sous-Erquery, dans les dures conditions des asiles sous l'Occupation allemandeet dans l'indifférence générale. Son dossier médical conservé à l'hôpital de Senlis porte la mention « cueille de l'herbe pour manger la nuit ; mange des détritus ».

Séraphine de Senlis est enterrée dans une fosse anonyme du carré des indigents au cimetière de Clermont. Elle avait pourtant exprimé, dans ses dernières volontés, le souhait de voir graver sur sa tombe cette mention : « Ici repose Séraphine Louis, sans rivale, et attendant la résurrection bienheureuse ».

Ses tableaux estimés à des milliers d'euros

Après la mort de Séraphine, Wilhem Uhde continue d'exposer ses tableaux, notamment lors d'une exposition exclusivement dédiée à elle à la galerie de France à Paris en 1945. "Ce n'est que plus tard, dans les années 70, lorsque l'on redécouvre l'art naïf, que l'on s'est vraiment intéressé aux œuvres de Séraphine", explique Alicia Basso Boccabella. Le musée de Senlis en possède 21 sur 109, qui sont régulièrement prêtées à d'autres musées : en France, en Allemagne, au Japon ou aux États-Unis. "On a eu la chance l'année dernière de les avoir toutes en même temps. À cause du confinement, on a dû mettre fin à l'exposition qui était prévue, mais les œuvres sont visibles en visite virtuelle", précise la responsable des publics du musée.

Les autres sont visibles notamment au musée Maillol de Paris, au La<m à Villeneuve-d'Ascq ou encore au musée international d'art naïf Anatole Jakovski à Nice. "Il y en a beaucoup aussi dans les collections privées, indique Goty Clin. Lorsqu'elle était dans le besoin, Séraphine troquait ses tableaux chez les commerçants de Senlis, donc il est certain qu'il y en a encore beaucoup dans la nature, chez des particuliers."

Aujourd'hui, certaines de ses plus grandes toiles sont estimées à plusieurs centaines de milliers d'euros. "C'est un art qui fonctionne très bien sur le marché, qui cote beaucoup", confie-t-elle. Comme beaucoup d'artistes, Séraphine n'aura pas eu la chance de connaître cette notoriété, elle qui disait selon le docteur Gallot, qu'elle aurait un jour "sa statue sur la place de Senlis."

À défaut, Yolande Moreau l'incarnera brillamment au cinéma dans le film Séraphine réalisé par Martin Provost sorti en 2008 et récompensé par 7 Césars dont celui du meilleur film et de la meilleure actrice. Des documentaires lui sont consacrés également au musée Henri Theillou sur l'histoire de la psychiatrie à Clermont.

Enfin, un catalogue raisonné de Pierre Guénégan regroupant toutes les œuvres de Séraphine est paru en mars 2021, en vente chez Artcurial. Pour la première fois, les lettres de l'artiste, écrites durant ses années d'internement à l'asile de Clermont de l'Oise, sont publiées. L'ouvrage comprend également de nombreuses analyses d'auteurs, historiens de l’art, psychiatres et psychanalystes.

Sources : reportage France 3 + Wikipédia

une des cartes postales retrouvées par Pierre Guénégan
Le Brestois Pierre Guénégan a « enquêté » pendant dix ans pour répertorier les œuvres de Séraphine Louis
mais aussi comprendre ses motivations profondes (DR)
Séraphine : « La femme m’a passionné autant que l’artiste » 
A propos de cette "enquête", je vous renvoie à la lecture de l'article passionnant publié par Sarah Morio dans le Télégramme du 03 juin 2021 sur le travail monumental élaboré par Pierre Guénégan sur Séraphine Louis, et notamment sur ce qu'elle a  pu écrire lorsqu'elle est internée et dans l'impossibilité de peindre.
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LE FILM "Joséphine" de Martin Provost - 2008

images du film "Joséphine" de Martin Provost 
C'est par le biais du merveilleux film de Martin Provost sorti en 2008 où Yolande Moreau a su incarner Joséphine d'une manière absolument admirable, que j'ai entendu parlé la première fois de cette femme peintre. Cette très grande actrice a su rendre à la fois cette passion de peindre qui habitait Joséphine d'une manière quasi mystique, et les troubles mentaux qui vont aller croissant et finir par la conduire à l'asile où elle finira sa vie misérablement et oubliée de tous.

1 août 2022

Perelesnyk et Rusalka, pour Eric

Pour ajouter une sirène à la déjà très belle collection d'Eric, j'ai trouvé cette très belle céramique réalisée par une artiste ukrainienne récemment disparue à l'age de 92 ans : Halyna Sevruk dont j'ai déjà eu l'occasion de présenter l'oeuvre ici

Perelesnyk et Rusalka
Céramique d'Halyna SEVRUK, artiste ukrainienne 
J'espère que cette sirène saura plaire à Eric et qu'elle arrivera à bon port, car les effectifs de la Poste en août. sont sûrement encore plus restreints que d'habitude. Je lui en souhaite une bonne réception.
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Qui sont ces figures dans la mythologie ukrainienne ?
Perelesnyk : c’est une créature démoniaque, un personnage de la mythologie ukrainienne qui rend visite aux femmes comme une étoile filante. Il s'incarne à l'image de parents et d'êtres chers décédés. Le Perelesnyk vient à ces femmes qui sont très affligées pour les morts. Dans certaines régions d'Ukraine, on pense que Perelesnyk est en fait l'esprit de l'être cher décédé par lequel la femme aspire.

En tant que "double" de la bien-aimée décédée, Perelesnyk peut nouer une relation conjugale avec cette femme. Les enfants nés sur ce personnage mystérieux de la démonologie ukrainienne étaient baggy, toujours affamés, mais se développaient très mal. Extérieurement, ils ressemblaient à des "odminky" (enfants remplacés par de mauvais esprits).

Il est très difficile d'expulser ce démon de la maison où il a décidé de rester, contrairement à d'autres esprits de notre mythologie (par exemple Antipko - "diable de la maison", qui a disparu après avoir brûlé des herbes sacrées). Il a été considéré que des plantes comme ruth, toya, marguerite (également sanctifiées) pourraient aider à se débarrasser de Perelesnyk. Cependant, il était dangereux de reprocher à la femme d'être en couple avec un Perelesnyk car il pouvait brûler la maison s'il se mettait en colère.

Selon certaines légendes, Perelesnyk a aspiré le sang d'une personne avec qui il était en couple. Il pouvait aussi étrangler les gens. Non seulement Perelesnyk était un séducteur de femmes, mais il était aussi la personnification de la foudre, des météorites et d'autres phénomènes atmosphériques qui terrifiaient nos ancêtres.

RusalkaSelon Vladimir Propp , Rusalka était une appellation utilisée par les premiers Slaves pour désigner les divinités tutélaires de l'eau qui favorisent la fertilité, et elles n'étaient pas considérées comme des entités maléfiques avant le XIXe siècle. Ils sortaient de l'eau au printemps pour transférer l'humidité vivifiante dans les champs, nourrissant ainsi les cultures. Dans les descriptions du XIXe siècle, cependant, le Rusalka est devenu un esprit inquiet, dangereux et impur.

Selon Dmitry Zelenin les jeunes femmes, qui se suicident soit commis par noyade en raison d'un mariage malheureux (ils auraient été éconduit par leurs amants ou maltraités et harcelés par leurs maris beaucoup plus âgés) ou qui ont été violemment se sont noyés contre leur gré ( surtout après être tombée enceinte d'enfants non désirés), doivent vivre leur temps désigné sur terre en tant que Rusalkas. La tradition slave originale suggère que tous les Rusalkas n'étaient pas liés à la mort par l'eau. Ils apparaissent sous la forme de belles filles, aux cheveux longs, généralement nues mais couvertes de leurs longues tresses, avec des couronnes de carex sur la tête. Ils vivent en groupes dans des palais de cristal au fond des rivières, n'émergeant qu'au printemps ; d'autres vivent dans les champs et les forêts. Au printemps, ils dansent et chantent le long des berges favorisant la croissance du seigle. Après le premier tonnerre, elles retournent à leurs rivières ou s'élèvent vers les cieux.

Ils étaient vénérés avec les ancêtres lors de la fête de Rosalia  au printemps, à l'origine une fête romaine pour offrir des roses (et d'autres fleurs) aux dieux et aux ancêtres ; du festival dérive le terme rusalka lui-même.  Une autre période associée aux Rusalkas est la semaine verte (ou  « semaine des Rusalkas ») début juin ; une caractéristique commune de cette célébration était le bannissement rituel ou l'enterrement de la Rusalka à la fin de la semaine, qui est resté populaire en Russie, en Biélorussie et en Ukraine jusqu'aux années 1930.

(source :https://stringfixer.com/fr/Vilja)                           
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Rusalka est aussi un opéra d’Antonín Dvořák créé en 1901 à Prague
Růžena Maturová, créatrice du rôle de Rusalka

L’opéra féerique Rusalka  rassemble plusieurs contes européens qui parlent de sirènes. Le librettiste, Jaroslav Kvapil, a souvent déclaré que ses sources étaient trois versions du xixe siècle qui avaient reformulé ces contes  : Ondine de Friedrich de La Motte-Fouqué (1811), le conte de Hans Christian Andersen La Petite Sirène (1837) et la pièce de Gerhard Hauptmann La Cloche engloutie. Kvapil et Dvořák connaissaient également les légendes de sirènes slaves, encore appelées rusalki. Une autre source importante, bien que celle-ci soit restée non reconnue, est l’histoire médiévale, en langue française, de Mélusine qui avait migré et survécu à travers toute l’Europe. Le destin de Rusalka, qui est isolée à la fois dans le monde humain mais aussi surnaturel, ressemble beaucoup à celui de Mélusine. Le traitement magique par Dvořák du livret de Kvapil est influencé par les échos de l’histoire de Mélusine qui courent en filigrane dans l’opéra. L’histoire française de Mélusine, dans ses transformations pan-européennes, a fini par devenir partie intégrante d’un renouveau apparemment bien « tchèque » de l’opéra et de la tradition du conte de fées.

Café et cacao sans limite, pour la Belle échappée de Calvisson et son 6e Festivalito

Avec ce mail-art textile, tricoté aux couleurs du drapeau national de la Colombie, j'ai voulu soutenir cette toute première exposition d'art postal organisée dans un petit village du Gard, Calvisson, pendant le week-end où va se dérouler leur  Festivalito n°6 . Le détail de l'appel à mail-art est donné ici

Clairement, avec ce mail-art,  je MILITE sans LIMITE pour la consommation des boissons de café et chocolatées,  issues des cultures de cerises de café et des cabosses de cacao d'Argentine. 
1/ Photo vue sur le site Caféwebstore 2/ © Guillermo LEGARIA AFP  article du journal le Point
3/
vue sur le site Terra Colombia  4/photo provenant du site les Globe-blogueurs
J'espère que les mail-artistes et les festivaliers répondront nombreux à l'appel de l'Echappée belle, et qu'ils auront matière pour faire une bien jolie première exposition d'art postal.

Halyna Sevruk : une grande artiste ukrainienne céramiste, peintre et sculptrice

Halyna Sylvestrivna SEVRUK
 Sculptrice-monumentaliste, céramiste, graphiste, peintre, 
membre de l'Union des artistes d'Ukraine, artiste émérite d'Ukraine, lauréat du prix V. Stus de l'Association ukrainienne de l'Intelligence créative indépendante (1991), du Metropolitan A. 
Prix ​​Sheptytskyi (1994).
Halyna Sylvestrivna est née le 18 mai 1929 dans la ville de Samarcande (Ouzbékistan), où sa famille était en émigration forcée depuis 1920. Son père, Sylvestr Martynovych, était architecte et sa mère, Iryna Dmytrivna , était un grand connaisseur de l'art. Grâce aux études culturelles et aux croquis de ce célèbre historien, on a appris pour la première fois en Ukraine les lieux saints d'Europe, d'Asie et d'Afrique, les caractéristiques et les inventions d'architectes étrangers. 

En 1930, la famille de Halyna Sevruk a déménagé en Ukraine (d'abord à Kharkiv, et à la fin de la guerre à Kyiv). Après avoir obtenu son diplôme de l'école d'art de l'Institut d'art d'État de Kyiv en 1959, Halyna Sylvestrivna a obtenu un diplôme de peintre. Elle a refusé de représenter des personnalités du parti, les transformant en idoles - elle a choisi une manière décente de trouver une harmonie mentale et artistique. Sa formation en tant que personne était principalement due à sa participation au Kyiv Club of Creative Youth "Contemporary", communication avec ceux que l'on appelle les non-conformistes Sixtiers.

Depuis les années 1960, Sevruk cherche de nouvelles voies dans l'art. Parallèlement, parallèlement à ses activités créatives, elle s'est engagée dans l'auto-éducation : elle a étudié la langue ukrainienne, l'histoire de l'Ukraine et l'art ukrainien, lu des livres auto-édités (samvydav) et des œuvres d'écrivains ukrainiens interdits. Halyna Sevruk était aux sources du Contemporary Creative Youth Club de Kyiv, a participé activement à ses événements, y compris des soirées dédiées aux écrivains, acteurs, artistes.

Panneau « Printemps » à l'intérieur de l'hôtel  « Zolotyi Kolos » à Kyiv -1964 - Céramique-Non conservé

Travaillant de 1964 à 1985 dans l'atelier de céramique de l'Académie d'architecture sur le territoire de la zone de conservation nationale «St. Sophia de Kyiv », sous l'influence de la chef d'atelier Nina Fedorova et de son mari, le critique d'art P. Musienko, elle s'est consacrée aux intérêts créatifs et aux idéaux de Rozstriliane vidrodzhennia [la Renaissance exécutée]. Là, elle a créé la première œuvre en céramique - "Le cri de Yaroslavna". Avec O. Zalyvakha, A. Horska, L. Semykina et H. Zubchenko, en 1964, à l'occasion du 150e anniversaire de Taras Shevchenko, elle a fait des croquis pour un vitrail dans le bâtiment rouge de l'Université nationale Taras Shevchenko de Kyiv - "Shevchenko. Mère », encadré par le vers du poète « Je glorifierai ces petits esclaves muets ». Le vitrail a été immédiatement détruit et la stèle de H. Sevruk "L'Arbre de Vie" a été ruinée.

Sevruk a été l'un de ceux qui ont signé une lettre aux dirigeants des organes soviétiques et du parti contre la répression de l'intelligentsia russe et ukrainienne, connue sous le nom de "La lettre de protestation de 139" (1968). En conséquence, un «tribunal» a été organisé au sein de l'Union des artistes d'Ukraine – et ceux qui n'avaient pas l'intention de se repentir ont été expulsés, y compris Halyna Sevruk. Pendant longtemps, elle a été privée de la possibilité de travailler de manière créative. Pendant 20 ans, ses œuvres n'ont pas été acceptées dans les expositions d'art, n'ont pas été présentées dans les musées et les commandes à passer dans les établissements d'enseignement culte ont été interdites.

À partir de la fin des années 1970, Halyna Sevruk se tourne vers un travail sur des peintures monumentales. En 1990-2000, elle a dirigé un atelier de céramique au Centre de créativité artistique de Kyiv pour les enfants et les jeunes.

"The forest song"

Le travail créatif de Halyna Sevruk comprend deux grandes compositions de mosaïques - "The Forest Song" (1963) et "The Lily" (1964-1965), de nombreuses stèles, la conception intérieure et extérieure d'hôtels, des images sculpturales d'anciens dieux slaves, des œuvres en céramique sur les thèmes de Kyivan Rus et de l'ère cosaque, des peintures, des portraits de personnages historiques et contemporains. En tant que céramiste, elle a travaillé sur les motifs de l'ancien État ukrainien et l'héroïsme de l'époque cosaque, où l'historicisme de son art résonnait avec les œuvres de S. Caraffa-Korbut.

Sevruk a résumé les œuvres dédiées à Kyivan Rus dans le panneau monumental en haut-relief "La ville aux sept collines", qui a été présenté sur le mur de l'hôtel "Tourist" de Kyiv, 1985 - 1987.

Panneau « La ville aux sept collines » à l'intérieur de l'hôtel « Turyst » à Kyiv 1985–1987 - ci-dessous fragment
Céramique, glaçures, émaux, verre, sels

Récemment, en 2020, lors de la rénovation de cet hôtel, les panneaux ont été démontés. À la suggestion de bénévoles et avec le consentement de l'administration de la zone de conservation nationale «St. Sophie de Kyiv », cette œuvre a été transférée dans le bâtiment du Consistoire de l'ensemble architectural de Sophie. La composition sera placée sur le mur d'une des meilleures salles du bâtiment du Consistoire récemment restauré.

Les œuvres de Halyna Sevruk sont des compositions psychologiques intéressantes qui donnent une idée des caractères et des humeurs humaines. L'artiste accorde la plus grande attention aux personnes extraordinaires, représentants de l'élite : clergé, hommes d'État, artistes, scientifiques, écrivains. Une page spéciale dans l'œuvre de H. Sevruk était une série de compositions de «l'ère cosaque» conçues sous diverses formes pour révéler le phénomène de la chevalerie cosaque, qui nous reflète encore le véritable or de l'art véritable.

H. Sevruk n'a pas non plus trahi le graphisme et la peinture. Ces techniques traditionnelles l'ont sauvée lorsqu'elle avait besoin d'apaiser la douleur et la confusion, de la verser sur du papier ou de la toile. Ce sont pour la plupart des œuvres philosophiques de la première période de la créativité, parmi lesquelles les plus expressives sont les toiles tragiquement peintes: «Broken Wings», «Betrayal», «Loneliness», «Suffering», «Father Is Going», «On the Other Side » – écrites à l'époque de la mort de son père, elles véhiculent le drame de la finitude de la vie humaine et en même temps des réflexions sur le sens de la vie.

L'art de Halina Sevruk est une histoire de pensée dynamique et créative, une couche importante de notre culture artistique, où il y a une place pour les skites, les anciens architectes russes et les glorieux ancêtres Hryhorovych-Barski. Les œuvres de l'artiste comprennent plus de 500 céramiques de chambre sur l'histoire de l'Ukraine, plus de 30 panneaux de céramique monumentaux dans divers monuments architecturaux de Kyiv, Tchernihiv, Odessa, Alushta. Ses œuvres sont connues bien au-delà de l'Ukraine. Artiste émérite d'Ukraine, exposante de tous les grands musées ukrainiens, Halyna Sylvestrivna Sevruk est une figure unique de la culture ukrainienne.

Préparé par Svitlana Moskalenko- Traduit par Natalia Timochenko
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Nous avons appris que 18 février 2022,  Halyna Sevruk s'est éteinte à Kiev à l'âge de 92 ans, exactement 6 jours avant l'invasion de l'Ukraine par la Russie de Poutine.


Années 60 - Les trésors perdus - Vidéo publiée sur le Youtube de Uanima

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S'il était encore possible d'en douter, il n'y a qu'à voir le parcours chaotique de cette artiste et ses efforts pour redevenir puis rester à tout prix une Ukrainienne, pour comprendre l'attachement viscéral de ce peuple à sa nation et le formidable esprit de résistance qui les anime aujourd'hui, face aux agresseurs russes.