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Composition en partant du haut d'une carte de l'Egypte ancienne complétée par les quatre poupées du Gebel el Zeit |
Le Gebel Zeit est riche en galène dont les mines ont été exploitées dès le
deuxième millénaire avant J.-C..
C'est à partir de ce minerai - qui est un composé cristallisé de sulfure de
plomb - que l'on obtient le kohl. Son utilisation la plus connue est bien sûr
le maquillage, ce noir, qui souligne de façon si reconnaissable les regards de
l'antiquité égyptienne. Ce qui est plus méconnu c'est qu'il possède également
de grandes vertus guérisseuses des infections oculaires. D'autre part :
"dès l’Ancien Empire, on utilise la galène comme fond pour fixer les
couleurs dans les monuments précisent Francis Janot, Philippe Vézie dans
"Les charmes de la galène".
Les missions menées sur le site, de 1982 à 1986, par l'IFAO ont révélé :
"deux vastes secteurs de mines pharaoniques ainsi qu'un habitat et un
sanctuaire… Durant plus de 800 ans des expéditions se sont succédé
régulièrement à Gebel el-Zeit à partir de la ville de Coptos en Haute Égypte
pour ramener le précieux minerai. La fouille de l'Ifao a permis aux
archéologues de mieux connaître les techniques minières de la Haute Antiquité
ainsi que la vie quotidienne et les pratiques religieuses des hommes qui vivaient
sur le site… Les expéditions qui se rendaient à Gebel el-Zeit, région
inhospitalière et sans eau, traversaient le désert oriental en emportant avec
elles le ravitaillement, les outils et le mobilier cultuel nécessaire à la
bonne marche de la mission".
En effet, dans l'Egypte antique, la religion était omniprésente, et des
sanctuaires ou lieux de cultes, étaient installés près de toute communauté.
Au Gebel Zeit, on honorait Horus et Min, mais le temple principal était
dédié à Hathor qui, en ce lieu, vraisemblablement en signe
"d'appropriation" était dénommée "Déesse de la Galène".
Hathor est en effet "érigée" en maîtresse de nombreuses pierres
précieuses ou semi-précieuses, ainsi, près des mines de turquoises, était-elle
adorée sous le titre de "Maîtresse de la turquoise".
Les fouilles mettront au jour de nombreux artefacts, notamment des stèles
et des ex-voto. C'est dans un enclos circulaire situé près du sanctuaire
d'Hathor qu'une découverte, aussi originale qu'extraordinaire sera faite : il
s'agit d'un ensemble de poupées de terre cuite d'une esthétique très
particulière.
"L'offrande la plus représentative du sanctuaire est une figurine
féminine dont les traits du visage sont extrêmement primaires : deux traits
incisés pour les yeux, un trait pour la bouche, un nez en forme de museau, pas
de front mais une chevelure élaborée. Les parties sexuelles, pubis et seins
sont fortement marquées. Des incisions circulaires figurent des ceintures et
des colliers disposés sur les corps nus" précise l'IFAO.
Modelées dans la terre cuite, extrêmement stylisées, elles mesurent de 12 à
18 cm. Elles sont parfois parées de perles et de scarabées et il arrive
également qu'un long tissu de lin les enveloppe.
Leurs jambes sont longues, leurs bras sont droits, tendus le long du corps,
les mains reposant sur les cuisses. La taille est très marquée et une rangée de
petits trous ou pointillés se trouve au niveau de ceinture, visant
vraisemblablement à reproduire la présence de tatouages.
Si le plus étonnant demeure leur visage, leur coiffure est également très
particulière. "Au Gebel Zeit, ces figurines ont deux styles différents de
coiffure : (l) une perruque en céramique, en trois sections, trouvée sur les
figurines antérieures (Moyen Empire, Seconde Période Intermédiaire) ; et (2) un
style plus tardif dans lequel des brins de lin traversent des trous dans le
sommet en forme de disque de la tête et sont attachés à des boules d'argile et
de perles, introduites à la Deuxième Période Intermédiaire et également connues
à la XVIIIe dynastie" indique Kathryn A. Bard dans "Encyclopedia of
the Archaeology of Ancient Egypt".
D'où venaient ces poupées et quel était leur rôle ?
Pour Pascale Ballet ("Potiers et fabricants") : "Les
figurines du Gebel Zeit appartiennent à un large groupe de statuettes façonnées
selon toute vraisemblance en Haute Egypte, et plus particulièrement dans la
région thébaine".
Quant au rôle de ces statuettes votives, il est évident que, représentées
ainsi nues et malgré tout parées, elles exhalent la féminité. "Leur dimension
érotique était indéniable, sans doute destinées à assurer les réjouissances du
défunt dans l'au-delà, mais aussi vouées à stimuler sa fécondité pour lui
assurer symboliquement une descendance nombreuse, souhait fondamental pour un
égyptien, ce qui explique aussi leur présence dans des tombes de femmes".
On ne peut s'empêcher de les rapprocher de la notion de concubines du mort…
Guillemette Andreux apporte cette analyse très intéressante : "La
présence et la fonction de ces statuettes, trouvées en grand nombre dans un
lieu si reculé, intriguent. Cependant, les autres exemples ont presque toujours
été mis au jour dans des lieux désertiques où régnait la déesse Hathor : à
Sérabit el-Khadim au Sinaï, ou à Faras et Mirgissa, en Nubie. On peut en déduire
que les poupées du Gebel Zeit sont un des éléments majeurs du culte local dédié
à Hathor et qu'on a affaire à des offrandes votives présentées à la déesse des
mines et des déserts, mais aussi grande protectrice de la fécondité et de
l’amour".
Le Musée du Caire a conservé une partie du lot de figurines, et, dans le
cadre du partage des fouilles, en 1986, l'autre partie (le site
"Cartel" du musée en référence treize) a été donnée au Musée Louvre.
sources de l'article et illustrations complémentaires sur le blog égyptophile :https://egyptophile.blogspot.com - Autrice : Marie Grillot
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