15 juin 2024

10 juin 2024 : Gauvain Sers s'adresse aux enfants d'Ouradour-sur-Glane avec un texte superbe

Quatre jours après le débarquement des Alliés en Normandie, le samedi 10 juin 1944, la vie du paisible bourg limousin d’Oradour-sur-Glane est anéantie en quelques heures par une action brutale, méthodique et délibérée d’une partie de la division Waffen SS Das Reich. 

643 civils hommes, femmes, enfants...y furent exterminés avec férocité et rage ; il n'y eut que très peu de survivants. Le dernier d'entre eux, Robert Hébras s'est éteint l'an passé à 97 ans, il avait voué sa vie à perpétrer le devoir de mémoire pour que jamais un tel drame ne soit oublié, 

Lundi 10 juin dernier, le chanteur et poète creusois, Gauvain Sers "très ému et honoré" était invité à la cérémonie de commémoration du 80e anniversaire de la tragédie du village martyr d'Ouradour-sur- Glane. A cette occasion, il déclama le texte superbe qu'il a écrit, Le chêne d'Ouradour, en s 'adressant  aux enfants du village.

Voici donc ce texte que je me devais de  partager avec vous : maintenant qu'il n' y a plus aucun survivant de cette barbarie, il nous appartient à tous d'en entretenir le souvenir dans la mémoire collective (merci Gauvain). 
 

Le chêne d'Ouradour

J'n'oublie pas le 10 juin
Mille neuf cent quarante-quatre
Moi, le dernier témoin
Qu'ils n'ont pas pu abattre
Je ne suis qu'un vieux chêne
Planté là par hasard
Dans un coin de Haute-Vienne
Qui revient d'un cauchemar

J'n'oublie pas que ce jour
Des tas d'hommes ici-bas
Venaient des alentours
Pour un peu de tabac
Et ce brave pâtissier
Qui s'inquiétait plutôt
De sauver sa fournée
Que de sauver sa peau

J'n'oublie pas toutes ces vies
Bienheureuses et paisibles
Cernées par des fusils
Qui les ont pris pour cible
Sur la place du champ d'foire
Ils ont fait ce samedi
D'un village sans histoire
Une immense tragédie

J'n'oublie pas le visage
De tous ces innocents
Des gamins de tout âge
Qui parlaient naïvement
Du match de dimanche
Autour d'un ballon rond
Ils n'ont pas eu la chance
De chausser les crampons

J'n'oublie pas dans l'église
Ces enfants et ces mères
La terreur, la surprise
L'incendie et l'enfer
J'n'oublie pas la seule ombre
Planquée dans les p'tits pois
Et j'n'oublie pas le nombre
De six cent quarante-trois.

J'n'oublie pas l'euphorie
Des bourreaux satisfaits
Qui se sont resservis
Du champagne bien frais
Cette nuit-là j'ai compris
Qu'les Hommes pouvaient trinquer
Même à la barbarie
Les branches m'en sont tombées

J'n'oublie pas, comme Robert
Les rescapés d'la grange
Des héros ordinaires
Qu'ont refusé les anges
Pour transmettre leur mémoire
Et tout vous raconter
Pour que jamais l'Histoire
Ne puisse se répéter

De nos jours les minots
Dans mon village martyr
Avancent sans dire un mot
Et ils peuvent ressentir
Ce qu'on n'est pas capable
D'expliquer dans les livres
Quand je vois leurs cartables
Moi, je me sens revivre

Dans cette lumière blafarde
J'entends voler les mouches
Y a des gosses qui regardent
Les impacts de cartouches
La Peugeot 202
Est devenue un emblème
Ils rentreront chez eux
Mais n'seront plus les mêmes

Il paraît qu'aujourd'hui
Rue de la Renaissance
La vie se reconstruit
On retrouve l'insouciance
Quand l'orage est passé
Le soleil apparait
Qu'il est beau de rêver
 un monde de paix

J'n'oublie pas le 10 juin
Mille neuf cent quarante-quatre
Moi, le dernier témoin
Qu'ils n'ont pas pu abattre
Je ne suis qu'un vieux chêne
Mais je veillerai toujours
Pour que l'on se souvienne
Des sept lettres d' O R A D O U R

Gauvain Sers (vidéo et texte disponible sur Instagram pour ceux qui sont sur ce réseau social)

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