En 2025, la France, deuxième plus grand territoire maritime au monde, célèbre l'Année de la Mer, une initiative nationale visant à éveiller les consciences face à l'urgence de protéger l'Océan.
C'est le thème que j'ai choisi de développer pour illustrer mes cartes de voeux.
Les tempêtes solaires seraient-elles responsables de l'échouage des baleines ?
De temps en temps, le Soleil
libère des salves de rayonnement électromagnétique susceptibles de désorienter
les baleines.
Les baleines grises migrent à
plus de 16 000 kilomètres le long de la côte ouest de l’Amérique du Nord,
un périple plus long que la quasi-totalité des autres mammifères. En été,
elles se dirigent vers le nord, atteignant souvent les îles Aléoutiennes en
Alaska. En hiver, direction le sud pour mettre bas au large des côtes du
Mexique.
De nouvelles recherches montrent
que les tempêtes solaires pourraient temporairement déboussoler les
baleines lors de ces longs voyages, et les pousser même à s’échouer. Les baleines grises seraient guidées par les champs
magnétiques de la Terre, ce qui expliquerait ce phénomène. Pour le moment, on
sait sans l'ombre d'un doute que c’est grâce à leur vision qu’elles trouvent
leur chemin.
Lors des tempêtes solaires -
activités du soleil au cours desquelles de grandes quantités de particules à
haute énergie sont propulsées - des taux élevés d’ondes électromagnétiques
s’abattent sur la Terre, ce qui aurait des répercussions sur les technologies
humaines comme les satellites et les réseaux électriques. La plupart des
animaux, y compris les Hommes, ne sont pas fortement touchés par les tempêtes solaires, notamment parce que le champ magnétique
de la Terre garde la planète à l’abri d’une grande partie de ces radiations.
Une étude publiée le 24 février
dans la revue Current Biology détaille le constat selon
lequel les tempêtes solaires pourraient favoriser l’échouage des baleines,
ajoutant une nouvelle donne au phénomène. On assiste actuellement à une
augmentation effrénée des baleines grises échouées, possiblement en lien avec
la famine qui découle de la raréfaction des proies. Plus de 180 baleines se sont
échouées depuis janvier 2019, un taux nettement supérieur à la normale.
Pour mieux appréhender les
facteurs qui contribueraient à l’échouage, Jesse Granger, biophysicien en
conservation à l’université Duke, ainsi que ses collègues, se sont penchés sur
les dossiers des baleines échouées vivantes, au large de la côte ouest de
l’Amérique du Nord depuis 1985. Ces cas ont été choisis dans le but d’exclure
d’autres facteurs — les animaux ne semblaient ni malades ni blessés lorsqu’ils
se sont retrouvés sur les plages. Comment expliquer donc l’échouage ?
Les chercheurs se sont rendu
compte que les baleines avaient quatre fois plus de chances de s’échouer les
jours où le bruit de la radiofréquence, due aux éruptions solaires, était plus
fort.
Des signaux parasites
Pour d’autres animaux, comme le
rouge-gorge familier (Erithacus rubecula), les études ont montré que le bruit
radioélectrique à large bande pouvait momentanément les empêcher d’utiliser
leur sens géomagnétique. Cette faculté permet aux animaux de ressentir le magnétisme
de la Terre, qui varie en fonction de l’emplacement, et leur permet donc de
savoir où ils sont et vers où ils se dirigent.
Les chercheurs supposent qu'il
s'agit bien du même phénomène dans le cas des baleines, affirme Granger,
actuellement doctorant.
« Bien que cette étude ne
fournisse pas de preuves concluantes quant au processus de magnéto-réception
chez ces baleines, elle esquisse des pistes de réflexion dans ce sens. Elle
élimine d’autres causes d’échouage comme les captures accidentelles, les collisions
avec les navires ou les maladies évidentes », déclare Ellen
Coombs, chercheuse à l’University College de Londres qui n’a pas participé
à l’étude. « Par ailleurs, les scientifiques s’attardent sur les
paramètres géophysiques touchés par les tempêtes solaires et leur incidence sur
la migration des baleines. »
On a la certitude que d’autres
animaux marins -comme la tortue de mer et le saumon- parcourent de longues
distances en ressentant ces champs magnétiques, affirme Ken
Lohmann de l’Université de Caroline du Nord. D’autres animaux comme
les abeilles, les oiseaux, les fourmis, les termites et quelques amphibiens
semblent dotés de cette même faculté. (Nous ne savons pas si les tempêtes
solaires affectent la capacité de ces animaux à s’orienter).
Les chercheurs ont réussi à
démontrer que certains animaux utilisaient leur sens magnétique en les plaçant
dans des bobines qui servent de gros aimants, mais les baleines sont trop
grosses pour de telles expériences.
Les baleines grises passent le
plus clair de leur temps sous l’eau sans repères visuels. Il va donc sans dire
qu’elles utilisent un autre sens que leur vision, déclare Coombs.
Perdre le nord
Dans cette étude, les chercheurs
ont tenu compte d’autres facteurs comme les cycles climatiques et les
variations saisonnières qui n’ont semblé avoir aucune incidence sur les
échouages. Ils ont également analysé l’intensité des activités du champ
magnétique de la Terre grâce à l’indice AP pour essayer de savoir si celles-ci
avaient un quelconque lien avec le phénomène d’échouage. Mais ce n’était pas le
cas, à la grande surprise de Granger qui s’attendait à ce que les perturbations
locales du champ magnétique puissent déboussoler la baleine et la pousser à
s’échouer sur la plage.
La théorie avancée est que
la « baleine se croit dans un lieu donné alors qu’en réalité, elle se
trouve quelques kilomètres plus loin », souligne Granger. Il semble que ce
ne soit pas le cas. Elle serait plutôt momentanément « aveuglée », ce
qui pourrait la désorienter et, par conséquent, la conduire à s’échouer,
dit Granger.
Comprendre : le Soleil
On pense que l’aptitude des
oiseaux à capter le champ magnétique de la Terre proviendrait de petites
protéines contenues dans leurs rétines : les cryptochromes. Il est
possible que le bruit radioélectrique entrave cette faculté qui dépend de la
capacité du cerveau à percevoir les légères variations électrochimiques.
Cependant, d’autres moyens permettent également de ressentir le magnétisme,
comme la magnétite, une espèce minérale contenant de l’oxyde de fer qu’on
retrouve dans le système nerveux de certains animaux.
Granger insiste sur la
multiplicité des facteurs qui pourraient potentiellement mener à l’échouage
comme la maladie, la famine, les collisions avec les navires et les
technologies humaines à l’image du sonar naval et des canons à air sismiques
utilisés dans la prospection pétrolière.
« Les échouages ne sont pas
dus à une raison bien précise mais peuvent avoir plusieurs origines. Il
n’existe donc aucun moyen d’éviter qu’elles se produisent [toutes] »,
précise Lohmann, avant d’ajouter : « Il est cependant utile que les
responsables de la conservation des cétacés prennent connaissance des facteurs
qui favoriseraient les échouages. »
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